28 juin 2010

La reine des lectrices - Alan BENNETT



Le livre

Titre original : The uncommon reader
Date de parution : 2007
Traduction française par : Pierre Ménard
Editions Denöel / Folio
110 pages


Le sujet
Voulant faire taire ses chiens qui se mettent à aboyer à cause du bibliobus garé dans l’arrière cour des cuisines du palais, la Reine Elisabeth découvre la lecture grâce à Norman, un aide aux cuisines qui devient son tabellion, c’est à dire son officier assistant littéraire.


Le verbe

Elle notait désormais en marge de ses lectures des commentaires fréquents (et plus assurés), appliquant à ce qui relevait peu ou prou de la critique littéraire la même droiture qu’aux autres secteurs de sa vie. Ce n’était pas une lectrice indulgente et elle aurait souvent aimé avoir les auteurs sous la main pour les morigéner.
« Serais-je la seule, nota-t-elle un jour, à souhaiter avoir une conversation sérieuse avec Henry James ? »
« Je comprends fort bien pourquoi le Dr Johnson bénéficie d’une telle estime, mais la plupart de ses propos sont aussi cauteleux qu’obtus. »
Un jour, à l’heure du thé, elle était en train de lire un ouvrage d’Henry James lorsqu’elle s’écria soudain :
- Allons donc ! Un peu de nerf bon sang !
La domestique qui s’apprêtait à enlever le plateau du thé balbutia :
« Excusez-moi, Madame » et s’éclipsa sur le champ.
- Mais non, Alice, dit la reine en se levant pour la rappeler. Je ne m’adressais pas à vous.
(p 54)
Mon complément
J'ai lu ce livre grâce à Malice qui me l'a offert et c'est vrai, sans cela je ne l'aurais peut-être pas lu si tôt après la vague de billets qui a surgit sur les blogs de lectures à son propos.

Les avis ne sont pas unanimes, personnellement, j'ai adoré ce livre que j'ai trouvé très drôle, intelligent, même si le personnage de la reine n'est pas très crédible : elle me parait bien trop aimable et courtoise vis à vis de ses sujets, mais comme je n'ai pas l'honneur de connaître la reine Elisabeth ni ce qu'elle pense vraiment, j'ai trouvé le décalage ou les conjectures de son comportement très amusantes.

J'ai trouvé très touchant le portrait de Norman, l'aide cuisinier promu au rang de "mentor" littéraire avant d'être évincé du palais par jalousie. La reine est dépitée par son départ car il y a entre eux une belle connivence. Et j'ai été très satisfaite lorsque la reine retrouve son ancien assistant et sanctionne l'homme qui a osé se débarrasser de son cher Norman.

Alan Bennett brosse le portrait des lecteurs, des auteurs et de la manière dont les non-lecteurs perçoivent les lecteurs en série : comme des bêtes de foire un peu fous. C'est très drôle, souvent très vrai, en tout cas je partage avec lui de nombreux points de vue.

25 juin 2010

Un pied dans la tombe - Jeaniene FROST




Le livre
:
Titre original : One foot in the grave
Date de parution : 2008
Traduction française par : Frédéric Grut (2010)
Editions Milady
450 pages


Le sujet :
Catherine Crawfield, l'hybride mi humaine mi vampire se retrouve à la tête d'une équipe gouvernementale chargée d'éliminer les vampires, goules et associés qui s'en prennent un peu trop aux humains innocents. Voilà 4 ans qu'elle a changé de ville, d'identité, d'apparence et se fait passer pour morte aux yeux de son amoureux, l'irresistible Bones, un maître vampire dont elle désire protéger la survie. Mais d'anciennes connaissances retrouvent sa trace.

Le verbe
:
Je lui passai le gin, en faisant bien attention de ne pas laisser mes doigts frôler les siens. Mais au lieu de prendre une gorgée d'alcool, Bones saisit la bouteille et me regarda droit dans les yeux tout en léchant mon sang sur la surface de verre lisse. Il fit glisser sa langue sur tout le pourtour de la bouteille, et une chaleur m'envahit soudain alors que je le regardais, hypnotisée. Quand il n'y eut plus une seule goutte rouge sur la surface de verre, il replaça la bouteille dans ma main tremblante.
(p 127)
Mon complément :
Nous retrouvons nos héros du tome 1 (Au bord de la tombe) :
  • Lui : le vampire justicier, une sorte de Josh Randall de la nuit qui traque les mauvais éléments du monde des surhumains.
  • Elle : la femme engendrée par une humaine et un vampire, dotée d'une force extraordinaire.

Cat se retrouve à la tête d'un groupe d'intervention qui comporte 4 hommes à ses ordres : Tate, Juan, Dave, puis Bones qui les rejoint au cours de ce deuxième opus des aventures de la chasseuse de la nuit.

Cat tente de vivre une petite histoire d'amour avec un vétérinaire, subit la déclaration enflammée de Tate, l'un de ses hommes qui est fou amoureux d'elle, retouve son cher Bones et fait connaissance de ses ex copines - de vieilles peaux de vaches évidemment ! et se découvre hyper jalouse, et retrouve Max son père, dont elle veut à tout prix la mort.

Encore beaucoup de combats, d'hémoglobine qui gicle ou qui se répand mais dans des scènes absolument délirantes, irresistibles de drôlerie (chacun ses goûts !), quelques scènes très chaudes quand même (pour public averti) entre Cat et Bones, les deux tourtereaux, mordus l'un de l'autre (on peut dire cela !).

Un super moment de lecture donc : on ne voit pas le temps passer, on rit franchement puisque certaines situations sont cocasses, et pour le reste... c'est imaginatif !

22 juin 2010

Le retour - Daniel CORKERY



Le livre
:
Date de parution : 1950
dans son recueil de nouvelles The Wager
Traduction française par : Patrick Reumaux
Editions Elisabeth Brunet
10 pages
Illustration de couverture Nightmare life in Death de Mervyn Peake


Le sujet
:
Irlande. Avant de rejoindre son bateau pour minuit, un marin épuisé décide de s'installer quelques heures dans une pension de famille où il désire passer un peu de bon temps à discuter, boire, et même tenter sa chance auprès d'une femme avant de se calotter avec le petit ami de celle-ci.

Le verbe
:
Il avait les mâchoires serrrées, le cou raide, le visage comme sculpté dans du bois. Les yeux avaient l'air maladroitement peints. Le regard était vide. Mais il se reprit et dit "Je vais être en retard", d'une voix qui les suppliait de ne pas le retarder et de ne pas lui poser de questions.
(p 67)
Mon complément :
Brr, une histoire qui fait froid dans le dos ! J'ai eu l'impression que Jim Daunt était un fantôme, un revenant qui avant de partir pour les terres inconnues, a désiré repasser dans le seul lieu qu'il reconnaissait comme son foyer.

- T'as pas changé d'un poil.
- Je te connais pas, aboya-t-elle en se libérant.
- Si tu me reconnais pas, y aura pas une âme à Cork pour dire qui je suis... Jim Daunt, que j'étais.
Un souvenir ou deux, insignifiants, lui traversèrent l'esprit.
(p 59)

Avec cet étrange récit, s'achève le recueil "3 morts salées" qui laisse traîner dans son sillage un goût sauvage de mystère, de côtes découpées battues par les vents et la mer, de vies rigoureuses où la survie dépend plus des croyances que de la raison.

Pour ma part, j'ai été impressionnée par la prose de Mary Lavin, dont je chercherai sans nul doute à lire d'autres oeuvres, dès que l'occasion se présentera.

Tombe verte tombe noire - Mary LAVIN


Le livre
:
Une nouvelle tirée du recueil de Mary Lavin :
Tales from Bective Bridge
Date de parution : 1942
et parue dans le livre "3 morts salées"
Traduction française par : Patrick Reumaux
Editions Elisabeth Brunet
18 pages
Illustration de couverture Nightmare life in Death de Mervyn Peake



Le sujet
:
Irlande. Deux pêcheurs récupèrent un corps dans leurs filets. Maintenant, il faut aller prévenir la jeune épouse du drame. Comment va t-elle accuser le coup, elle pour qui les amoureux doivent être enterrés ensemble dans la tombe noire de la terre ?

Le verbe :
Et tandis qu'ils regardaient, un autre coup de langue de la venimeuse langue bifide de la mer passa par dessus-bord et se fraya un chemin vers le corps. Tadg Beag la fouetta avec le filet déchiré.
- Garde tes forces pour le heurt que t'auras à faire contre la porte de bois, dit Tadg Mor.
Et Tadg Beag comprit qu'il serait celui qui marcherait sur les galets pour apporter la funèbre nouvelle à la mariée de l'année, si étrange parmi les femmes de l'île avec ses cheveux au vent, le soir, et ses pieds blancs trempés dans la mer, le jour.
(p 43)
Mon complément :
"Tales from Bective Bridge" est un recueil de 10 nouvelles ayant pour décor l'Irlande profonde. Mary Lavin, née en 1912 en Amérique est retournée vivre en Irlande à l'âge de 13 ans, où elle trouve matière à écrire, principalement sur la population rurale.

Le pont Bective donnant le titre au recueil :

(Clic sur l'image pour agrandir)

Tombe verte tombe noire est ma nouvelle préférée, très inspirante et inspirée ! On y comprend toute la douleur ; par la découverte du noyé d'abord "celui qui va le plus manquer à la communauté est celui qui disparaît toujours"... puis par la douleur de la jeune veuve, dévoilée à travers la pensée des deux pêcheurs qui en brossent le portrait tout en force d'une femme amoureuse, rompue à l'art d'amadouer la mer pour qu'elle ne lui prenne pas son cher époux, mais prête à s'y jeter pour le retrouver...

La femme fardée - Liam O' FLAHERTY



Le livre :
Traduction française par : Patrick Reumaux
Editions Elisabeth Brunet
30 pages
Illustration de couverture Nightmare life in Death de Mervyn Peake



Le sujet
:
Irlande. Patrick et Martin, deux frères, rudes pêcheurs vieux garçons vivotent chichement dans leur maisonnette mal tenue. Le jour où Patrick décide de prendre femme, rien ne va plus entre lui et son frère. C'est que Kate Tully, la future épouse est veuve, qu'elle a un gamin et qu'elle a un mauvais genre qui inspire la méfiance, ou la jalousie...

Le verbe
:
Dans la plus grande chambre, où le lit nuptial avait été préparé, les gens se relayaient pour manger. Les femmes allaient et venaient, apportant des théières qui chauffaient sur le feu, dans la cuisine. D'autres femmes pressaient les invités vers la table. Déjà très saoul, Patrick ne cessait de circuler en hurlant à tout le monde d'être heureux. Il y avait dans la fête un air de hâte et d'insousciente sauvagerie qui dénotait un manque de décence et de respect. Les plus vieux le remarquèrent et se mirent à chuchoter.
(p 19)
Mon complément :
Première histoire qui ouvre 3 morts salées, le recueil de nouvelles dédiées à l'Irlande, la mer, la mort et ses mystères.
Il s'agit là d'une intéressante étude des comportements parmi une petit communauté, ou l'étranger se confond avec l'étrange, où le sang dans les veines bat parfois aussi rudement que les vagues déferlantes.

21 juin 2010

L'Enterrement de Roger Malvin - Nathaniel HAWTHORNE

et autres contes étranges




Le livre
:
Traduction française par Henri PARISOT
FLAMMARION, coll. L'Âge d'or, 1977
150 pages





Le sujet :
3 contes rassemblés dans ce volume

1 - L'Enterrement de Roger Malvin (Roger Malvin's burial) 1832
Après une éprouvante bataille, Roger Malvin s'étend sous un arbre et ne se relèvera plus. Il implore son compagnon de partir chercher du secours, ou de le porter en terre. Bien que blessé, le jeune Reuben parvient au village mais, enfermé dans un mensonge, il lui est impossible de partir à la recherche de Malvin.

2 - La Tache de naissance (The Birthmark) 1843
Aylmer, une sorte de savant fou et un peu alchimiste décide d'ôter du visage de sa femme Georgiana une étrange tache de naissance qui a la forme d'une petite main.

3 - L'Artiste du beau (The Artist of the Beautiful) 1844
Un jeune horloger cherche le bonheur dans la satisfaction d'imaginer et de créer un merveilleux papillon mécanique.

Le verbe :
Tout en parlant, il posa sur la table ce qui paraissait être un écrin à bijoux. Il était d'ébène, richement sculpté de sa propre main, et inscusté de motifs de nacre représentant un peti garçon à la poursuite d'un papillon qui, plus loin, était devenu un esprit ailé et volait vers le ciel, cependant que le petit garçon, ou l'adolescent, avait trouvé tant de force dans son vif désir, qu'il montait de la terre vers les nues, et des nues vers l'atmosphère céleste, pour s'y emparer du Beau.
(p 146)
Mon complément :
Impossible de lire Auster sans y trouver Hawthorne, à tel point que je pensais que Hawthorne était - encore - un personnage de fiction. C'est donc pour prolonger l'univers d'Auster que j'ai eu envie de lire Hawthorne, et l'occasion m'en a été donnée en découvant ce livre par hasard.

une vieille édition dédicacée par le traducteur
(Hawthorne est mort en 1864, soit 100 ans avant ma naissance !)

Ces trois récits ont comme point commun le doute, l'obsession. Nos personnages se battent contre le temps, la nature, contre la terre qui les attirent alors qu'ils rêvent du ciel.

Dans le 1er récit, face à l'incertitude de la mort de son vieux compagnon d'armes, Reuben ne peut trouver de repos parce qu'il n'a pas tenu sa promesse. Son destin le porte inexorablement vers la dépouille impatiente.

Dans le 2ème récit, un docteur génial est contrarié par l'imperfection que porte sur la joue sa très jolie jeune femme. Il n'a de cesse de trouver le remède qui fera disparaître cette horrible marque et doute de ses capacités, tandis que sa femme qui lui fait entière confiance est prête à tout pour lui faire plaisir.

Dans le 3ème récit, le jeune Owen désire plus que tout parvenir à créer le Beau, et passe jours et nuits à imaginer un frêle papillon.

C'est un ouvrage délicat, dit l'artiste avec calme. Comme je vous l'ai dit, il est imprégné d'une essence spirituelle - appelez cela magnétisme, ou ce que vous voudrez. Dans une atmosphère de doute ou de moquerie, son exquise sensibilité souffre le martyre, comme le fait l'âme de celui qui lui a instillé la vie.
(l'Artiste du Beau)
Trois contes merveilleux, j'ai un faible pour le dernier ! Vraiment très exceptionnel : une prose délicate sans mièvrerie, redondance, lourdeur, comment dire cela... c'est superbe, un enchantement.

Il y avait cet encart dans le volume que j'ai trouvé :

(clic pour agrandir l'image)

Une chose est sûre, Hawthorne m'intéresse !

19 juin 2010

L'inceste - Christine ANGOT


Le livre
:
Date de parution : 1999
Editions Stock
189 pages

Le sujet :
Christine Angot n'aime plus son amante. Chrisine Angot aime sa fille, mais ne s'aime pas. Pas trop, pas depuis cette terrible épreuve vécue après la rencontre d'avec son père, cet inconnu. Elle avait 14 ans et il aimait la baiser et qu'elle le baise.

Le verbe
:
Je ne sais plus ce qu'il faut faire, je ne sais plus ce qu'il faut dire. Je vais raconter cette anecdote, je ne suis pas Nietzsche, je ne suis pas Nijinski, je ne suis pas Artaud, je ne suis pas Genet, je suis Christine Angot, j'ai les moyens que j'ai, je fais avec. Il y aura une anecdote, tant pis, la description d'un déclic, ce sera Noël, ce sera descriptif. Ma folie sera décrite à travers un déclic. J'en étais à peine consciente, jusqu'à la page précédente. C'était pire. (p 89)
Mon complément :
LVE m'a prêté ce livre car depuis longtemps, il est pour. Pour Angot, et je ne l'avais jamais lue. Vue oui, à la télévision. Toujours calme, maîtresse, pudique malgré les questions des journalistes toujours plus persantes et pressantes. Cela me faisait mal. J'ai donc lu ce livre un peu sans savoir à quoi m'attendre, coté style. J'ai eu du mal : il faut aimer la destructuration, le coq et l'âne et le passage de l'un à l'autre. Bref, c'est spécial.

Le contenu aussi est spécial, "space" comme je dis toujours, spécifique, spéculatif, et extrêmement discursif. Heureusement, le livre est court. Je ne sais pas si j'ai aimé. Mais je l'ai lu rapidement, pas pour m'en débarrasser, mais bon, on ne lit pas ce genre de livre pour le plaisir, ça non.

Christine Angot (se ?) raconte : comment elle est devenue homosexuelle, pendant 3 mois, avec Marie-Christine, le prénom a été modifié pour le récit, peu importe. Marie-Christine ne l'aime pas, pas comme elle voudrait, alors Christine veut rompre.

Christine sait qu'elle ne peut être aimée normalement, depuis l'inceste (ce sujet est traité, mais pas tout au long du livre, quelques pages et heureusement).

Christine peut-elle être heureuse, un peu ? grâce à l'écriture j'espère. Au moins, il reste cela pour s'affirmer. Christine peut-elle écrire sur un autre sujet qu'elle même ? Je ne sais pas.

Merci Th. pour m'avoir fait connaître Angot. Et l'autofiction. Je découvre, et même si je ne comprends pas tout, cela fait partie du mystère.

Lien en rapport avec ce billet :

17 juin 2010

La chambre dérobée - Paul AUSTER



Le livre

Titre original : The locked room
Date de parution : 1986
Traduction française par : Pierre Furlan
Editions Actes Sud - 1991
154 pages


Le sujet
Fanshawe disparaît, sa femme, persuadée qu'il est mort, se décide à solliciter le narrateur afin qu'il prenne connaissance de l'oeuvre littéraire de son ancien ami d'enfance et décide si celle-ci vaut la peine d'être éditée. Peu à peu, le narrateur en vient à croire que Fanshawe est vivant, qu'il se cache quelque part. La jalousie le taraude, Fanshawe a toujours été son modèle de perfection ! A tel point qu'il finit par désirer qu'il disparaisse vraiment.

Le verbe

L'histoire toute entière se ramène à ce qui s'est passé pour terminer, et si je n'avais pas à présent cette conclusion en moi, je n'aurai jamais pu commencer ce livre. Il va de même pour les deux volumes qui précèdent celui-ci Cité de verre et Revenants. Ces trois récits, au bout du compte, sont la même histoire, mais chacun représente un stade différent de ma conscience de ce que à quoi elle se rapporte.
...
Si les mots ont suivi, c'est uniquement parce que je n'ai pu faire autrement que de les accepter, de les prendre à mon compte et d'aller là où ils voulaient bien que j'aille. (p 401)

Mon complément

Loin du texte de la lecture "le monde pseudonyme de Paul Auster" proposé à la fin de la Trilogie par Marc Chenetier, je veux parler de ce qui me touche en tant que lectrice.

J'ai adoré ce volume.

M'y plonger fut pour moi une sorte de bain de jouvence : ce genre de livre m'autorise de manière incroyable à percevoir tout ce que j'aime, ce qui est important pour moi, ce que j'ai envie de dire, de partager. Ce livre me pousse à écrire moi-même.

Il va de soi que je suis un peu triste d'arriver à la fin, d'autant qu'il n'y a pas vraiment de fin, mais une sorte de nouvelle porte vers un autre monde, un autre livre suggéré.

C'est toujours ainsi que je lis Auster, du moins ses anciens livres car à part Dans le Scriptorium, je n'ai rien lu de lui plus récent.

S'intéresser aux mots, s'inventer dans ce qui est écrit, croire au pouvoir des livres - voilà qui submerge tout le reste, et en comparaison notre propre vie se rapetisse considérablement. (p.306)
Comment ne pas être séduit par cet extrait ? Je vous le demande. Bien sûr, je suis.

Le narrateur accepte la difficile mission de sortir de lui-même pour entrer dans un autre, vivre la vie de l'autre, il part sur les traces de Fanshawe pour se retrouver, percer le secret de l'absent pour émerger.

On avait l'impression qu'existait en lui un noyau caché où on ne pourrait jamais accéder, un centre mystérieux du secret. (p.288)
Mais Fanshawe est un pirate, un saboteur, un menteur, un bonimenteur, un voleur : il glisse dans la vie comme une étoile filante, irresistible et en même temps insupportable. Est-il le bourreau ou la victime ? peut-être les deux à la fois puisque c'est un écrivain, un inventeur : tout est possible... même la possibilité de n'avoir jamais disparu, ou d'être devenu fou.

Voilà tout ce qui m'est passé par la tête à la lecture de ce livre imbriqué, où les noms des personnages se reflètent d'un volume à l'autre, où la réalité s'immerge dans la fiction, comme si Auster faisait une sorte de scrapbooking avec des morceaux récupérés de sa vie intérieure et de sa vie affective dans son atelier intime, son cerveau, sa chambre dérobée, au monde et aux explications...

A la fin, le puzzle assemblé ne ressemble à rien de connu ou de définissable, et chacun y verra son propre labyrinthe, son propre dénouement. Et c'est cela qui est merveilleux.

Comme il s'agit aussi d'un livre où la filiation a un rôle d'importance, je me suis amusée à faire l'inventaire des enfants qui apparaissent dans la TNY :
  • Peter, l'enfant tenu enfermé durant 9 ans dans une pièce obscure par son père pris de démence
    Je pense qu'il est probable qu'il s'est mis à croire à quelques unes des idées religieuses extravagantes sur lesquelles il avait écrit. Ca l'a rendu fou, absolument dément. On ne peut pas dire ça autrement. Il a enfermé Peter dans une pièce de l'appartement, il a recouvert les fenêtres et l'a gardé comme ça pendant 9 ans. Une enfance entière passée dans l'obscurité, isolée du monde, sans aucun contact humain à part une raclée de temps à autre. Je vis avec le résultat de cette expérience et je peux vous dire que les dégâts ont été monstrueux. Ce que vous avez vu aujourd'hui, c'est Peter au meilleur de sa forme. Il a fallu treize ans pour l'amener à ça et je ne suis pas près de laisser quelqu'un lui faire à nouveau du mal. (TNY- Cité de Verre - p 47)
  • L'enfant mort de Daniel Quinn
    Son bureau était parti, ses livres, les dessins d'enfant de son fils mort étaient partis. (TNY- Cité de Verre - p 174)
  • L'enfant mort sur lequel enquêtait Doré et dont il avait fait réaliser un masque mortuaire
    Cet homme du nom de Doré, s'est trouvé obsédé par le meurtre. Avant que l'enfant ne soit enterré il a fait un masque mortuaire de son visage et, dès lors, il a consacré tout son temps disponible à percer ce mystère. Vingt ans plus tard, ayant atteint l'âge de la retraite, il a quitté son travail et voué chacun de ses instants à cette affaire. Mais les choses ne sont pas allées à son gré. (TNY- Revenants - p 198)
  • Bleu qui se souvient de son père - et aussi de l'alpiniste qui avait retrouvé le corps de son propre père victime d'une chute plus de 20 ans auparavant.
    Seul dans les montagnes, à des kilomètres de tour être humain, le fils passa par hasard sur un corps dans la glace - un mort parfaitement intact, comme préservé en arrêt momentané des fonctions vitales. Il va sans dire que le jeune homme s'arrêta pour l'examiner, et lorsque en se penchant il regarda le visage du cadavre, il eut l'impression aussi nette que terrifiante qu'il était en train de se voir lui-même. (p 210)
  • L'enfant de Fanshawe, Ben, qu'adopte le narrateur, puis Paul, l'enfant qu'il a avec Sophie
    Et je veux adopter Ben, ai-je dit. Je veux qu'il porte mon nom. Il est important qu'il grandisse en me considère comme son père. (p 330)

Peu de choses à rajouter, si ce n'est que ce livre est riche, riche de tant de choses qui me parlent que je n'ai qu'une envie, c'est de lire très prochainement "L’invention de la solitude", il me le faut !!!

13 juin 2010

Revenants - Paul AUSTER




Le livre

Titre original : Ghosts
Date de parution : 1986
Traduction française par : Pierre Furlan
Editions Actes sud 1991
80 pages




Le sujet
1947. Bleu est détective privé, ayant débuté dans la profession avec Brun. Un jour, Blanc lui demande de surveiller Noir. Bleu s'installe dans un appartement juste en face de celui de Noir, annonce à la future Mme Bleu qu'il part en mission pour quelques temps. Il y reste longtemps. Assez pour que la future Mme Bleu ne le devienne jamais, et pour que lui même ne sache plus très bien qui est Blanc ou Noir.

Le verbe

On est le 3 février 1947. Certes, Bleu est loin de se douter que l'affaire durera des années. Mais le présent n'est pas moins obscur que le passé, et tout aussi mystérieux que ce que l'avenir tient en réserve. Ainsi va le monde : on avance pas à pas, d'abord un mot, puis le suivant. Il y a un certain nombre de choses que Bleu ne peut en aucun cas connaître à ce stade. Car la connaissance s'acquiert lentement, et lorsqu'elle vient elle paie souvent d'un prix personnel élevé. (p.191)
Mon complément
Deuxième roman de la Trilogie new-yorkaise, Revenants aborde le thème de ce qui nous hante. Les souvenirs, la mémoire de ceux qui ont été notre modèle et qui nous ont quitté, les endroits où l'on vit et où d'autres avant nous ont laissé une trace, autant de petits cailloux qui sont semés et qu'on l'on peut voir ou ignorer.
Vivre avec le manque et faire en sorte de ne pas se perdre.

Dans ce roman, Auster utilise encore un personnage qui espionne, celui-ci ignore pourquoi, mais il cherche à savoir qui est cet homme qu'il doit surveiller, et cette incertitude l'oblige à plonger dans ces démons intérieurs. Et prochainement, "La chambre dérobée", le tome 3 de la Trilogie New-Yorkaise, avec en complément, toutes les réflexions qui me sont venues au cours de la lecture de la trilogie.

12 juin 2010

La cité de verre - Paul AUSTER




Le livre

Titre original : City of glass
Date de parution : 1985
Traduction française par : Pierre Furlan
Editions Actes Sud 1991
170 pages




Le sujet
New-York. Quinn écrit des romans policiers sous le pseudonyme de William Wilson dans lesquels il met en scène le détective Max Work, devenu au fil des années une sorte de double contrarié, en effet Max est tout son contraire. Un jour, il reçoit par erreur un appel qui le mène à enquêter sur l'étrange affaire d'un homme tenu enfermé par son père durant 9 ans.
Pour accomplir sa tâche, Quinn oublie son identité.

Le verbe
L'enfance était un thème trop douloureux pour lui, surtout lorsqu'il s'agissait d'enfants qui avaient souffert, qui avaient été maltraités ou qui étaient morts avant de pouvoir grandir. Si Stillman était l'homme au poignard revenu pour se venger du garçon dont il avait détruit la vie, Quinn tenait à être là pour le mettre en échec. Il savait bien qu'il ne pouvait pas ressusciter son propre fils, mais il pouvait au moins faire qu'un autre ne périsse pas. (p.58)
Mon complément
Premier roman constituant la Trilogie new-yorkaise, La cité de verre aborde le thème du vertige de l'identité, de la recherche des origines : la nôtre, celle de nos désirs, de nos inquiétudes, de l'enfance, de la perte d'un être cher, celui-ci pouvant être soi-même.

Pour se sentir capable d'accomplir sa mission, Daniel Quinn se glisse dans la peau de son personnage de fiction, le détective Max Work, qui est à l'opposé de ce qu'il est : plus téméraire, plus audacieux, plus performant.

Il note le résultat de sa filature dans un cahier rouge, ce qui lui permet de faire son rapport quotidien à la femme qui l'a engagé. Mais loin de se contenter de garder Stillman à l'oeil, il entreprend de percer le mystère de cet homme au comportement étrange, ce fou qui sillonne le quartier dans lequel il se cantonne, de manière a priori chaotique. Quel est son dessein ?
Et quel est le destin de Quinn ?
Nous le saurons en nous plongeant de manière vertigineuse -et consentante - dans ce roman à facettes qui pose la question de la création, de la fiction, de la liberté.
  • Prochainement, "Revenants", le tome 2 de la Trilogie New-Yorkaise.
Lien externe

11 juin 2010

Barbara la rousse - Liam O'FLAHERTY

Barbara la Rousse et autres contes vert sombre


Le livre
:
Titre d'origine : Red Barbara and Other Stories
Date de parution d'origine : 1928

Traduction française par : Patrick Reumaux
Editions Elisabeth Brunet (Rouen)
Illustration de couverture Lady Dedlock de Mervyn Peake
40 pages

Le sujet :
4 nouvelles profondes comme l'âme du terroir irlandais.

1/ La chute de Joseph Timmings / The fall of Joseph Timmings
Un homme malheureux en amour s'arrange avec ses démons intérieurs.

2/ La maudite
Une fille-mère est chassée de toutes parts, même de la maison de dieu.

3/ Barbara la rousse / Red barbara
La veuve d'un pêcheur se remarie avec un étranger qui apporte le progrès et la culture au village mais qui n'obtient pas la prospérité dans son foyer.

4/ La mort de Lanigan le loup
Un fugitif trouve refuge chez une ancienne amie qui pourrait bien avoir gardé une dent contre lui.


Le verbe :
Une expression de douloureuse insatisfaction passa sur son visage nerveux et il se mit à penser à elle, avec détestation. Jusqu'à présent, il l'avait écoutée lire sans prêter attention au sens des mots. Maintenant il en prenait conscience et les haïssait, car ce qu'ils disaient - l'Eglise persécutée - représentait son malheur. L'Eglise, c'était sa femme, avec son corps asexué, ses binocles sur le nez et son horreur du lit nuptial.
(p 7)
Mon complément :
Un petit livre que m'a conseillé le très sympatique libraire de la minuscule librairie découverte en sortant d'un bus (comme quoi le hasard suit parfois de bien étranges chemins) et dans laquelle je suis entrée, intriguée...
Je dois dire que je suis conquise par cet auteur qui ressemble un peu à Le Fanu ; j'aime les histoires courtes, limite fantastiques, borderline si vous voyez ce que je veux dire, dans ces histoires là, la folie n'est jamais très éloignée de la seule liberté possible.

Lien en rapport avec ce billet :

07 juin 2010

Little bird - Craig JOHNSON



Le livre

Titre original : The cold dish
Date de parution : 2005
Traduction française par : Sophie Aslanides
Editeur Gallmaister
400 pages



Le sujet
Wyoming. De nos jours. Deux ans après le viol de Melissa Little Bird, une jeune indienne, par quatre adolescents condamnés avec sursis, l'un d'entre eux est retrouvé descendu par une carabine longue portée. Walter Longmire, le shérif du comté d'Absaroka, prend à coeur cette enquête dont les indices mènent vers une piste sous le signe de la vengeance, tout en subissant un entraînement forcené de la part de son vieil ami indien dit "L'ours", qui le pousse à reprendre goût à la vie et à l'amour, goût perdu depuis son veuvage.

 Le verbe

Je descendis la vitre au maximum, c'est à dire à peu près à mi-chemin, et respirai. Dans un contraste frappant, l'air frais du canyon se mêla à l'odeur tiède de moisi qui régnait dans le camion. C'était quelque chose que j'aimais dans le camion de Henry, même si je ne lui avais jamais dit : son odeur chaleureuse de vieux métal, de terre et de cuir. J'avais grandi dans des pick-up comme celui-ci, et j'y trouvais une forme de sécurité, un souvenir sensoriel qui transcendait les marques et les écussons. Je regardais alentour les vestiges de tous ces rêves nomades et pensais à la mobilité de la nostalgie dans l'Ouest. Aucune des roues autour de moi ne retrouverait probablement jamais la route mais restait-il, hébergées dans les intérieurs brûlés par le soleil et dans les carrosseries rouillant lentement, des passions profondément enracinées ? Rien n'était moins sûr, mais l'espoir a souvent un relent d'éternité. (p.185)
Mon complément
Tout d'abord, ma première remarque va vers Lily (So many books so little time) qui m'a très gentiment prêté ce livre que j'ai reçu avec un bonheur identique à celui d'un enfant qui découvre un cadeau sous le sapin. Le geste m'a touchée, avant le texte, qui est lui aussi une merveille, ou du moins qui est de ceux capables de m'émerveiller.

Je ne connaissais pas la prose de Craig Johnson mais je savais qu'il est de la même trempe que Jim Harrison, un de mes écrivains préférés, car j'avais lu l'article consacré aux romanciers américains dans le magasine GEO de novembre 2009 :



aticle sur Craig Jonhson
(clic sur cet article pour l'agrandir)

C'est donc avec fébrilité et une sorte de bien-être que j'ai commencé ce livre qui est de ceux qui font parler la terre et la mémoire des hommes (petit frisson).
Absaroka
Dans cette histoire, nous suivons Walt, le shérif dépressif qui se laisse aller à la dérive depuis la mort de sa femme. Poussé par son meilleur ami Henry Standing Bear à reprendre du poil de la bête (décrassage matinal et amélioration de l'habitat), Walt se rapproche de la belle Vonnie, son amie d'enfance perdue de vue -et désormais veuve- et s'évertue à découvrir qui peut bien vouloir dégommer un à un les quatre petits connards qui ont violé la pauvre petite Mélissa, un crime demeuré impuni dans la mesure où les protagonistes ont fini par être relâchés parce qu'ils étaient mineurs.
J'essayais de trouver quelque chose à dire, mais rien ne semblait assez sincère. Tout ce que j'avais à l'esprit, c'était qu'elle me paraissait terriblement douce et engageante. J'eus soudain une image un peu confuse d'elle, de mon lit, là-bas, chez moi, et de tous mes besoins terrestres comblés en même temps. Elle ne semblait pas appropriée non plus.
- Peut-être qu'on devrait se voir, un jour.
Peut-être était-elle appropriée finalement. (p 59)
L'arme utilisée pour descendre les jeunes est un Sharps, une carabine de précision qui ne court pas les rues...


L'étau se resserre, mais nous ne devinons rien de rien sur l'identité du tireur, uniquement révélée dans les dernières pages, et avant d'en arriver là, nous suivons les pistes de Walt, ses soupirs, ses frayeurs, ses fatigues, et tout ce qui le hante. En un mot, nous avons de l'empathie pour lui.

C'était difficile à décrire, mais faire la cour à Vonnie semblait m'élever à un autre plan. Sans pour autant essayer de ressembler à un adolescent malade d'amour, je trouvai le monde meilleur, comme si l'air que je respirais avait un petit quelque chose de plus. (p 157)
Un style qui fouette, très plaisant, très imagé et sensoriel. Le récit étant à la première personne, il est assez facile de se glisser au premier plan de cette enquête. Il y a du sordide, mais l'humour est toujours présent, surtout dans les dialogues ou les réflexions que fait Walt, sans compter qu'il est le premier à se moquer de lui-même. Cette histoire est la première d'une série mettant en scène le shérif Longmire, je parie que je vais devenir accro.

Liens externes

Adaptation de Longmire en série à découvrir ici

05 juin 2010

Chez l'épicier de Paris

Je suis à Paris depuis, disons 19 ans. C'est long, et en même temps, je n'ai pas vu le temps passer, surtout, et il faut me croire, j'ai perdu beaucoup, beaucoup de temps à me morfondre, à ne rien faire, à me désespérer même, oui, il n'y a aucun autre mot. Jeune alors, j'ai vécu une vie de nonne, et qui plus est, j'avais peur de tout et de moi en particulier. Pas facile donc pour moi de me sortir de mon sanctuaire. Si j'en parle avec autant de franchise, c'est que cette ancienne fille désespérante est morte, plus ou moins.
A près de deux semaines de quitter cette vie de yoyo, avec ses hauts et ses bas, je parcours Paris comme sur un échiquier : en zig-zag, de manière complètement intuitive, impulsive. En ce moment, je ne passe pas une semaine sans faire un saut à la grande épicerie du Bon marché. Je m'y délecte, j'y dépense des sommes déraisonnables pour ce que je rapporte dans mon cabas, mais je suis heureuse car tout cela me fait plaisir.
Petite anecdote. J'ai entendu à la télé parler des célèbres gauffres Méert. Célèbres ? et bien je n'en avais jamais entendu parler, et pourtant je suis une pure Ch'timi, sans l'accent mais née dans le 59. Une certaine femme politique célèbre à Lille avouait en rapporter pour ses amis parisiens, et bien, point besoin d'aller si loin, il y en a à Paris, pas données données, certes, mais un cadeau n'a pas de prix...et cela reste accessible.
Il y a également tout un tas de produits, rangés par pays, Canada, US, Italie, Espagne, etc...j'ai cherché Angleterre, mais je n'ai pas trouvé, en même temps, j'y retourne bientôt, et la prochaine fois, je demanderai.

02 juin 2010

Le rêve de l'escalier - Dino BUZZATI


BUZZATI

Le livre
:
Titre original : Le notti difficili (partie 2)
Date de parution : 1971
Traduction française par : Michel Sager
Editions Laffont (Livre de poche)
150 pages


Le sujet :
Italie. 25 nouvelles fantastiques qui parlent des rêves, des illusions, du temps qui passe, du temps qui se casse, un peu de magie, beaucoup de folie...

1/ Le rêve de l'escalier
Un escalier se dérobe sous les pas du rêveur

2/Crescendo
Une femme reçoit la visite d'un souvenir.

3/ Le papillon
Un homme imagine échapper à la mort en prenant possession d'un autre corps.

4/ Mosaïque
Le destin et la mort dans 23 tableaux.

5/Tic-tac
Un étrange bruit d'horloge annonce des bouleversements.

6/Anecdotes de la ville
Destin et mort en ville.

7/Vieille auto
Un homme n'arrive pas à se débarrasser de sa voiture.

8/Changements
Evolution du regard sur les choses qui nous entourent.

9/Récit à deux voix
Deux amis enchaînent une histoire l'un après l'autre.

10/Délices modernes
La guérilla - les pollutions - les pirates de l'air et la drogue

11/Icare
Un satellite va s'écraser sur la Terre. Le savoir ou pas...

12/Inventions
Les progrès et l'intuition.

13/Vitesse de la lumière
Au rythme du progrès du chemin de fer.

14/Bestiaire
4 histoires d'animaux très particuliers.

15/L'aliénation
Un homme constate qu'un autre a pris sa place.

16/Progressions
Le culte de la narration.

17/Une soirée difficile
La peur de mourir.

18/Vergetures du temps
Distorsions du temps.

19/Lettre d'amour
Les sacrifices de l'amour.

20/Petits mystères
Petits récits mystérieux.

21/Au sommet de la vague
Les embarcations de l'humanité.

22/Les vieux clandestins
D'étranges lunettes révèlent à celui qui les porte ceux qui vont bientôt mourir.

23/L'éléphantiasis
Expansion anarchique des molécules de polymères.

24/Clair de lune
Le pouvoir de la lune sur la perception des choses et du temps.

25/L'épouse ailée
Une épouse docile mais mal mariée finit par perdre ses ailes en découvrant l'amour.


Le verbe
:
Au clair de lune, qui transforme les pauvres apparences du jour en un paradis où il serait beau de naufrager à jamais, les choses du premier âge, restées intactes tandis que nous nous précipitons au fond du puits de la vie, elles aussi cherchent à me parler.
(p 139 - Clair de lune)
Mon complément :
Deuxième partie des nouvelles parues en 1971 sous le titre "Le notti difficili", je retrouve les ingrédients qui me donnent des frissons depuis l'échine jusqu'au mollet, qui m'enthousiasment, je me trempe dans ce monde là comme un oiseau perdu retrouve son nid.

Buzzati est un écrivain du "fantastique" : il coud la frontière du rêve sur les bords de notre conscience. Nous ignorons quelle piste suivre mais nous nous en moquons, seul compte le chemin emprunté dans la peur, l'émotion, glissant sur les pentes vertigineuses de l'amour, de la mort et de la déraison. Comme chez Paul Auster, nous ne savons si le récit a pour origine une réalité, quelque part en ce mode, mais ce qui est réel c'est de tenir la page qui nous engouffre dans le monde des émotions, des souvenirs, des obsessions. Le véritable secret est entre nos main : le pouvoir de créer est un don que dieu jalouse aux écrivains.

Y aura-t-il à la fenêtre le pâle archiduc qui s'est tué par amour, et qui semble phosphorescent ? Ou bien (les têtes balancées par le quadruple martèlement en la mineur) les grands, les nobles, les femmes fatales, ou les aventuriers sans pitié des vices et des romans ? Ou la princesse cireuse que ses riches parents, pour essayer de la sauver, veulent conduire à Syracuse, mais toujours ils se trompent de train, et la jeune fille s'enfuit et meurt en traversant les steppes et les montagnes, milliers et milliers de kilomètres, tandis que le vieux cheminot, immobile devant les rails morts, voit s'évanouir, là-bas au fond, la vie, les espérances désormais lointaines, et tandis que de l'autre côté, tout doucement, s'avance le grand caillot de ténèbres, la grande chose noire, qui ne vient que pour lui ?
(p 75 - "Vitesse de la lumière")

Liens en rapport avec ce billet :

01 juin 2010

Au bord de la tombe - Jeaniene FROST




Le livre :
Titre original : Halfway to the grave
Date de parution : 2007
Traduction française par : Frédéric Grut (2009)
Editions Milady
512 pages



Le sujet
:
USA. Catherine Crawfield, une jeune femme mi humaine mi-vampire, déterminée à tuer le plus de vampires possible pour venger sa naissance, s'associe bien malgré elle à Bones, un maître vampire de plus de 200 ans, chasseur de prime en guerre contre les mauvais éléments de sa race.

Le verbe :
Dans la rubrique "contenu", Bones avait écrit "Tofu". Il avait parfois un sacré sens de l'humour. Nous n'embarquâmes donc qu'avec nos bagages à main. Bones me laissa une nouvelle fois le siège près du hublot, et je sentis la puissance des réacteurs qui montaient à plein régime. Il avait les yeux fermés et je remarquai que ses doigts se crispèrent légèrement sur l'accoudoir lorsque l'avion se mit à accélérer.
- Tu n'aimes pas l'avion, on dirait ? demandai-je, surprise.
C'était la première fois que je le voyais avoir peur.
- Non, pas trop. Les accidents d'avions constituent l'une des rares morts accidentelles dont peut être victime un vampire. (p 284)
Mon complément :

Dans la foulée des romans de "jeunes", j'ai testé Jeaniene Frost et voilà le titre que la libraire m'a dégoté. Ignorante de ce que c'était j'ai été surprise : alors là, nous ne sommes plus dans la cour d'école (ou alors pour les multiples redoublants du secondaire) car certains passages sont très "chauds".

Bon, cette mise au point faite, nous avons une sorte d'histoire à la Buffy contre les vampires (j'ai vu TOUTES les saisons, TOUS les épisodes, et oui, je suis un peu accro à tout ce qui touche au fantastique) : beaucoup, beaucoup d'hémoglobine, de baston, pas mal d'humour, et... du sexe (ben oui, même Buffy finit par succomber à Spike, son ennemi de toujours).

Dans ce récit, il est question d'une enquête sur une organisation vampirique (aidée par certains humains) qui fait une grande consommation de jeunes femmes que l'on retrouve en petits morceaux ou pas du tout...

On lit ce livre TRES rapidement !!! le style est vivant, beaucoup de scènes d'actions assez visuelles, des dialogues qui font mouche, pas du tout "gnan-gnan" et l'idylle naissante au fil des pages entre Cat et Bones est absolument délicieuse : on y croit !
J'avais l'impression que mes poumons manquaient d'oxygène, et Bones lui-même respira une ou deux fois - un record, comparé à son rythme respiratoire habituel. (p 235)
(je vous laisse imaginer ce qui s'est passé auparavant)
Les vampires ne sont pas présentés comme des bêtes sanguinaires, mais comme une autre race, vivant parmi les humains depuis la Genèse, elle a ses propres codes, ses conventions, ses lois, et même une moralité, oui, ils ont des sentiments !

Un mot sur la couverture : bah ! pas terrible, trop aguicheuse !!! Du coup mon mari a lorgné dessus ce soir lorsqu'il a vu le livre posé à côté de l'ordinateur dans l'attente de rédiger mon billet. Il m'a demandé s'il y avait du sexe, je lui ai répondu "oui, un peu, mais c'est un livre pour les filles" ; je me demande si finalement je ne vais pas le laisser traîner sur la table de nuit, histoire d'avoir son avis.

Notons que ce livre est le tome 1 de la série "Chasseuse de la nuit", le tome 2 intitulé "Un pied dans la tombe" sort ce mois-ci.

admirez le pitch !