[JOURNAL] La petite fille à l'imagination infinie
C'est lors des séjours à la campagne, dans cet environnement à apprivoiser à chaque vacance, que j'ai développé un sens démesuré à l'invention et à la tragédie. J'endossais une nouvelle identité, je me donnais un nouveau prénom, et j'inventais des histoires avec des amis imaginaires. Disposant (dans mon souvenir) d'une grande liberté d'action dans la mesure où ma tante savait où je me trouvais, j'organisais des ventes de sirop à base de peinture, je faisais des gâteaux de terre patiemment tamisée de toutes les couleurs, j'arrosais les fleurs au crépuscule.
Tant que mes amies n'étaient pas encore arrivées, j'allais jouer dans le bûcher dont j'aimais l'odeur du bois sec mélangée à celle du foin qui séchait dans le grenier. J'avais sélectionné quelques livres de jeunesse qui m'enchantaient et qui me faisaient parfois peur. Lorsque mes amies Anne et Isabelle arrivaient enfin, nous jouions à la colonie de vacances et nous partions en vadrouille en longeant un morceau de la départementale, chantant à tue-tête Compère Guilleri, Vent frais vent du matin (en canon !), La fille du coupeur de paille, Nous aimons vivre au fond des bois et bien sûr l'Alphabet scout !
Bien des années après, il m'arrive de revoir les lieux, d'entendre les rires lorsque je sens l'odeur du foin ou de l'herbe mouillée. Rien n'est plus satisfaisant que de confronter sa mémoire aux souvenirs bruts que le temps n'a pas usé.
illustration : Michèle Purnal
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