[JOURNAL] La chambre à soi
Le bonheur d'avoir une chambre à soi. Une pièce parfois invisible car les murs sont des obstacles entièrement inventés, le résultat d'un nombre incalculable de fils tissés depuis longtemps et qui finissent par se superposer en une toile fragile qui se referme autour de toi. Une chambre qui cultive les émotions comme d'étranges mots qui viennent se déposer comme des papillons sur un cahier immaculé et à la lueur de ton coeur ils y laissent des traces. Ce sont d'anciennes conversations dont l'écho s'était perdu et qui reviennent dans la chambre que tu as préparé comme la mère de n'importe quelle espèce prépare un nid. Rien n'est plus mystérieux que cette épaisse tranche hétéroclite, mille feuilles qui pourraient ressembler à un tas informe à des yeux ignorants mais que tu connais parfaitement. Tu as la clé de cette chambre où tu trouves parfois refuge comme dans un musée. Tu retrouves les repères sans les dates, les blocs imposants que tu n'as pas pu porter plus loin mais la place est infinie comme la dimension des rêves et il reste encore de l'espace pour les fourmillements, les battements, les grésillements, les intentions silencieuses qui y trouvent le repos. Ton front appuyé contre la vitre de cet espace miraculeux, tu n'as pas longtemps à attendre avant de recommencer à écrire.
illustration : Anna Ådén
Dans nos fors intérieurs, des idées murissent puis sont le fruit de nos écrits
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